Sang négrier : une critique très efficace de l'esclavage...

Aujourd'hui j'ai choisi de vous parler de Sang négrier, une pièce de théâtre écrite par Laurent Gaudé. A l'affiche depuis le 18 janvier 2018, tous les jeudis et ce jusqu'au 1er mars 2018, au Théâtre La Croisée des Chemins ( 43, rue Mathurin Régnier 75015 Paris ), elle est mise en scène par Khadija El Mahdj et Bruno Bernardin y apporte son talent en tant que seul acteur, pendant 1 heure 30.

Un homme, ancien commandant de navire, usé par le temps et la peur raconte le jour où il est devenu fou. Il a été précédemment commandant d'un navire négrier. Dans le port de Saint-Malo, soudain, alors que lui et son équipage font une escale, les esclaves nègres qu'il transporte à fond de cale s'échappent. Commence alors pour lui et ses hommes une traque dans les rues de la ville, une traque qui les mène jusqu'aux limites de la raison. Ils ramènent tous les esclaves, sauf un. Ce dernier concevait une étrange vengeance qui, des années plus tard, hante encore l'esprit de ce commandant de navire.

Pour ma part, j'ai beaucoup aimé la pièce, le jeu d'acteur est excellent, les jeux de lumières sont bien maîtrisés et surtout l'histoire nous fait vraiment prendre conscience de l'horreur de l'esclavage et de la déshumanisation des esclaves.

Je vous conseille donc vivement de la voir, le nombre de place et les représentations sont limités jusqu'au 1er mars !

Amaury PICARD

Un "club-théâtre" à Schuman !

Interview de deux membres du Club Théâtre (propos recueillis par François Favé et Amaury Picard)    Depuis 2 ans que le Club Théâtre existe au Lycée Schuman, il ne cesse de compter de nouveaux adhérents. Nous avons rencontré deux de ses membres : Daniel a déjà participé au club l'année dernière et a ainsi pu nous parler de son expérience avec plus de recul tandis que Marie, ayant adhéré en septembre dernier, nous a renseigné sur les projets en cours. Daniel (membre le plus ancien) et Marie (nouvelle adhérente) ont accepté de répondre aux questions du JDL. JDL : Tout d'abord, qu'est-ce-qui vous a poussé à vous inscrire au Club Théâtre ? Marie : Je me suis dit que le Club Théâtre pourrait me permettre d'améliorer ma façon de m'exprimer, mon éloquence et pourrait donc m'être très utile pour l'oral de français du bac et la soutenance de mon TPE. De plus, ça pourra aussi me servir pour le travail, la vie professionnelle. Et aussi, j'aime bien profiter du lycée, parce qu'il nous offre beaucoup d'activités extra-scolaires. Daniel : Ce sont à peu près les mêmes raisons qui m'ont poussé à m'inscrire. Aujourd'hui, je pense que je peux dire que j'ai effectivement acquis plus d'aisance à l'oral grâce au club. JDL : Daniel, qu'avez-vous fait au Club l'année dernière et combien étiez-vous ? Daniel : Nous avons surtout fait de l'improvisation l'année dernière mais, à la fin, le groupe a animé le concours d'éloquence du lycée. Nous étions cinq inscrits au club l'an passé. JDL: Marie, que faites-vous en ce moment au Club et combien êtes-vous ?   Marie : Pour les quatre premières séances de l'année, on a uniquement fait de l'improvisation. Là, on a décidé de choisir d'organiser des débats sur des thèmes d'actualité, comme l'égalité homme/femme ou le harcèlement. JDL :  Marie, allez-vous organiser une représentation en public et/ou animer le concours d'éloquence cette année ? Marie : Oui, je sais qu'on fera une représentation à la fin de l'année, où tout le lycée est invité ! Nous remercions Marie et Daniel d'avoir répondu à nos questions et informons nos lecteurs qu'il est tout à fait encore possible de s'inscrire au club. Certains l'ont fait encore tout récemment. Les cours du Club Théâtre ont lieu tous les lundis de midi à 13 heures en Salle de l'Europe.

“Oedipe-Roi” dans le texte… et dans l'esprit ?

Le mythe d'Œdipe est un mythe intemporel repris par de nombreux artistes. Nombre d'auteurs se sont questionnés sur l'interprétation la plus pertinente pour représenter la tragédie Œdipe Roi, écrite initialement au Ve siècle avant Jésus-Christ par Sophocle. Reproduite au théâtre par Corneille en 1606, par Jean Cocteau avec La Machine Infernale en 1934 ou encore au cinéma par Pasolini en 1967, l'œuvre a été renouvelée par certains metteurs en scène de façon originale, peut-être trop parfois ? Oedipe Roi Vendredi 24 février 2017, un groupe d'élèves de la Terminale Littéraire du lycée Robert Schuman est allé assister, au Théâtre Berthelot de Montreuil, à la réinterprétation d'Oedipe Roi  par la Compagnie Vivi, dans une mise en scène de Tilemachos Moudatsakis. Les avis étaient mitigés, certains élèves sont sortis du théâtre en se demandant pourquoi ils s'y étaient rendus pendant que d'autres y ont vu une opportunité leur permettant d'étudier en profondeur l'œuvre en vue de l'épreuve du baccalauréat qui approche à grands pas. La pièce de Sophocle et son adaptation cinématographique par Pasolini sont en effet inscrites à l'épreuve de littéraire du bac L 2017. A notre arrivée dans la salle, des surtitres étaient projetés : la pièce a en effet été jouée dans la langue originelle de l'œuvre. Pour présenter ses partis pris, le metteur en scène de la troupe est arrivé, nous informant de l'importance de cette œuvre en Grèce. Nous apprenons alors que tout étudiant grec se doit de connaître l'œuvre, qu'elle est étudiée et est connue par tous. C'est l'une des raisons pour lesquelles cette troupe grecque a pris la décision de jouer, devant nous, ce soir-là, la pièce en grec. Ce choix a suscité l'intérêt des spectateurs en faisant de cette mise en scène une représentation particulière et unique. La compagnie a aussi, en plus du désir de jouer la pièce dans une langue étrangère, pris la décision de mêler la mise en scène de la pièce et le jeu théâtral à des expressions corporelles et des arts martiaux. Mais avant, pour commencer, la lumière s'est allumée sur Œdipe, sur scène, cachant derrière lui trois membres du chœur qui pourraient être interprétés comme la fidélité des habitants de Thèbes à leur roi Œdipe, accusé de souillure envers ses terres. La pièce commence donc avec un roi imposant qui fait bonne figure envers le public et son peuple. Une décision du metteur en scène qui insiste sur un élément peut-être moins présent dans la pièce : l'amour et la souveraineté que porte la communauté à son roi au début. Ensuite, cette figure d'obéissance présente dans le chœur a évolué par la création de mouvements chorégraphiés. Le chœur s'est ensuite mis à se déplacer sur scène lors des stasima avec des emboîtements enchaînés de leurs bras. Emboîtés, les personnages étaient donc liés durant une grande partie de la pièce et ne pouvaient donc pas s'échapper les uns des autres. Cela peut être compris par les spectateurs comme une représentation du fait qu'Œdipe ne peut échapper à son destin. Mêler langue originelle de l'œuvre à une mise en scène simple, dansée mais aussi chantée était un bon choix du metteur en scène. On retrouvait dans certaines scènes du chœur quelques chants. Un talent qu'avait un des comédiens et dont la troupe a tiré bon profit : cela donnait une autre perception du mythe que l'on a l'habitude de voir. En revanche, plusieurs points négatifs de la pièce ont été relevés par les élèves spectateurs ce soir-là. Pour commencer, dès notre arrivée, une scène vide : deux grands bâtons en bois sont disposés de part et d'autre. Ces deux bâtons serviront par la suite à alimenter la scène d'altercation entre Œdipe et Créon, mais mis à part ça, la scène était vide : une déception pour les spectateurs qui y voyaient une opportunité, en plus de l'utilisation de la langue grecque tout au long de la pièce, de découvrir des décors grecs ou des éléments nous intégrant plus dans l'ambiance de la tragédie. En plus de cette scène sombre et vide, les costumes des comédiens ont été, eux aussi, considérés comme un échec de mise en scène. Un simple morceau de tissu entouré d'une ceinture, le tout enveloppant le corps du Roi Œdipe. Des vêtements quelconques que l'on peut retrouver dans les armoires de n'importe qui pour le chœur. Un simple haut décolleté avec un short pour Jocaste. Et le plus marquant : un short argenté fluorescent pour le messager qui a provoqué une grosse incompréhension dans la salle. Il n'y avait aucune cohérence entre les costumes et avec l'ambiance qu'il aurait dû y avoir. Une énorme déception pour le public qui n'a pas pu trouver satisfaction avec les éléments qui peuvent être considérés comme les plus importants pour une mise en scène d'une pièce de théâtre : le décor et les costumes. Ce sont les premiers détails décisifs que voient les spectateurs et qui peuvent, ou non, créer leur intérêt pour une pièce. Un intérêt qui peut aussi être perdu lorsque, dès les premières minutes de la pièce, les comédiens ne se souviennent déjà plus de leur texte, ce qui fut le cas ce soir-là pour Oedipe. Une mauvaise impression était donc donnée avant même que le spectateur soit séduit. Pour en revenir à la chorégraphie élaborée par la troupe, la signification de cette dernière n'est malheureusement qu'une hypothèse émise par nous-même. Il aura fallu en discuter pour pouvoir en tirer cette conclusion. Sur le moment même, la chorégraphie n'avait de sens pour personne. Aucune interprétation n'a pu être directement remarquée et aucune explication n'a été donnée. La chorégraphie n'a pas non plus tellement évolué tout au long de la représentation avec des mouvements de bras qui ne signifiaient et ne montraient rien de particulier. On ne savait donc pas réellement où la troupe cherchait à nous emmener en déambulant de cette façon sur scène. Pour finir, malgré la tentative de sympathie que l'on pouvait ressentir envers cette mise en scène, un élément interne est venu perturber le déroulé de la pièce. En ayant pris la décision de jouer la pièce dans une langue étrangère, il a donc fallu trouver un moyen de traduire les répliques en direct : c'est bien évidemment un surtitrage qui a été mis en place. Une bonne idée qui était de faire découvrir la langue au public, mais cela captait donc toute l'attention des spectateurs sur le haut de la scène où étaient projetés les surtitres et pouvait donc faire passer le public à côté d'éléments de la pièce, autres que le short fluo du messager qui, lui, était inévitable. Sans compter que, malheureusement, la gestion de ce surtitrage était elle aussi décevante. A certains moments, en retard, les régisseurs ont donc dû se presser à passer aux répliques suivantes sans nous laisser le temps de les lire entièrement. La représentation a aussi dû être interrompue à un moment car les régisseurs s'étaient perdus lors de la projection des surtitres. Une situation remarquablement bien gérée par les comédiens qui se sont figés et ont attendu les instructions du metteur en scène leur disant où reprendre la pièce. Certains partis pris du metteur en scène Tilemachos Moudatsakis d'Oedipe Roi repris par la troupe grecque Vivi sont donc des idées intéressantes. La reprise de la langue originelle du mythe, les chants des chœurs, la chorégraphie auraient pu donner une vision particulière et plaisante de l'oeuvre de Sophocle. Mais malheureusement plus d'éléments vont à l'encontre du succès d'une mise en scène qui aurait pu être atteint si les décors et  les costumes avaient été plus travaillés.

Cyril THEOPHILOS

«